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la capitelle de Castans

Ca faisait longtemps que j’avais envie de bâtir une capitelle de A à Z,  « du sol au plafond ». Au printemps 2004, j’ai trouvé un magnifique endroit au sud de Castans (Aude ) sur le Quiersboutou (837 m) d’où l’on a une superbe vue panoramique. Juste à côté, il y avait des lauzes délitées qui pourraient fournir la matière première. J’ai proposé cette installation au G.R.A.A.L. de Castans. Le 21 septembre 2004, avec mon copain Djemel, nous avons commencé le chantier et nous avons passé une (courte) nuit dans l’abri de fortune. Au matin, les bénévoles de l’association sont venus nous rejoindre et le travail s’est brusquement accéléré. A plusieurs, on a pu transporter des dalles de couverture beaucoup plus lourdes. Le chantier s’est encore poursuivi le lendemain et le plus gros était fait. J’avais monté là haut une brouette et un court tuyau de cheminée mais ils ont été enlevés.  Et je viens d’avoir l’agréable surprise de découvrir que sur la version la plus récente de la carte IGN, la capitelle y figure !

en langue des sagnes

« La langue des sagnes », c’est le titre de cet excellent petit livre auto-édité et écrit par Céline Rives-Thomas. Avec beaucoup de générosité et d’humanité, elle décrit la longue aventure de l’association Rhizobiòme depuis les débuts difficiles où les tourbières n’étaient bonnes qu’à être drainées jusqu’à la reconnaissance officielle de leur statut et de leur importance en passant par le douloureux épisode de Sivens. J’ai eu la surprise- car elle ne me l’avait pas dit- d’y retrouver un de mes textes du côté de la page 234. Alors je ne résiste pas à l’envie de vous le citer…
Dans la Guerre du Feu, le film de Jean-Jacques Annaud qui met en scène le livre de Rosny ainé, on voit le clan pourchassé se réfugiant avec son précieux feu sur des ilots au milieu des marais. Le marais comme refuge ? Drôle d’idée ! Fallait être
sacrément arriéré, genre paléolithique bas de plafond, non ? Il est vrai que les tourbières, marais et autres sagnes ont longtemps souffert de mauvaise réputation. D’un déficit d’image pour parler le moderne : angle mort de l’agriculture; relique de l’époque glaciaire; point aveugle du paysage. Vieux fossile quoi. L’inconscient qui ose s’y aventurer y trouve pêle-mêle des plantes carnivores, minuscules ça d’accord, mais sait-on jamais si elles venaient à muter, des lézards ovovivipares- mais ils l’ignorent-, des ancêtres de Bob l’éponge, des bottes dépareillées et des humains momifiés depuis des siècles à la suite de rituels pas très catholiques. Le vocabulaire lui-même en porte les traces : la tourbe désigne ce combustible végétal ( qui a du mal à s’allumer et puis qu’on a du mal à éteindre ) mais aussi la populace, la foule des bas-fonds. Elle cotoie la fange, la lie. Tourbe souffre de son voisinage avec bourbe, bourbier. La sagne, c’est terra incognita, c’est le lieu du désordre de la nature, le sauvage, le saltus gallo-romain par opposition à l’hortus, à l’ager. C’est l’èrm. Avant d’être ERM ( Environemental Resources Management, oh yeah ), l’èrm en occitan c’est le désert d’où dérive le mot ermite. Et le lieu non cultivé, n’est-il pas synonyme d’inculture ? Allez zou, drainez-moi tout ça !
Toutefois, pour les anciennes cultures, marais et sagnes jouaient un rôle bien plus ambivalent. Refuge de génies et créatures amphibies, la sagne, lieu de culte et d’offrandes cultuelles. jouait également un rôle psychopompe. Dans maints contes, celui qui s’aventure à traverser le miroir de l’eau au péril de sa vie, risque de voir son existence transformée à jamais après son passage entre les mondes…
Aujourd’hui la croissance à tout berzingue a montré ses limites. Les bénéfices que l’humanité a pu en retirer sont grevés par une addition astronomique de dégâts environnementaux irréversibles. La croissance est devenue une mécroissance. Une excroissance proliférante. Une tumeur. Aujourd’hui aux Etats-Unis, l’eau potable vaut plus cher que le pétrole. Sur toute la planète les ressources s’épuisent. Après la guerre du feu, les guerres de l’eau. Se souvient-on encore que dans ressource, il y a source ?
Et voici qu’aujourd’hui, par une singulière inversion des valeurs dont l’Histoire est coutumière, voici que les sagnes, cet oeil mort qu’on regardait avec réserve devient… réserve de vie. A l’heure de la gestion responsable et nécessaire de l’eau, les sagnes, par leurs capacités naturelles de rétention et de régulation peuvent devenir le premier maillon d’une hydronomie raisonnée. Une banque d’eau. Quand le culte de la croissance devient le trou noir du futur, le progrès qui stagne, la sagne représente la mémoire archaïque de l’eau et redevient un sanctuaire. Si tu ne sais pas où tu vas, souviens-toi au moins d’où tu viens. Va replonger tes racines dans ce sanctuaire d’eau, cette matrice primordiale. Tu verras, la flotte y est discrète, mais claire et abondante. Je ne sais si la sagne a le pouvoir de nous absoudre de nos erreurs d’aménagement. Mais il faut saluer ici le travail exemplaire de ces pionniers du réseau Sagne qui, à rebrousse-poil, à rebrousse-administrations, à rebrousse-air du temps, réinventent patiemment le beau métier de chercheurs d’eau. Hier filant à contre-courant, aujourd’hui ils coulent de source.
Et n’oubliez pas vos bottes.
Et elle a cru bon d’ajouter : « artiste plasticien, conteur, écrivain, musicien … GB est un sacré personnage. Personne mieux que lui ne vous emmène dans le mystère des sagnes en Pédégueine déguenillé.Il joue des mots, des objets, des couleurs, des notes de musique… Tout est bon pour ouvrir l’imaginaire, avec en prime toujours ce sourire généreux qui emporte la foule. »
Stop !

Pedegueine s’imprime !

Certains se souviennent de Pédégueine ( en occitan pied de renard ) mon personnage de braconnier-chaman-sorcier-rebouteux-conteur. Voilà t-y pas qu’il se retrouve à présent en quelque sorte immortalisé dans un livre ! Il s’agit de l’excellent travail de Céline Rives-Thomas « la langue des sagnes » qui retrace l’aventure de ces pionniers tarnais qui ont décidé de réhabiliter ces tourbières occitanes. Voila ce qu’on peut lire à la page 204: « Ca sent le champignon. C’est l’automne. Les feuilles rousses commencent à colorer le paysage et à chanter de leurs nuances mordorées la fin de l’été. Les enfants courent devant, sautant sur les dalles de granit, enjambant les grosses racines qui barrent le chemin. Tandis que la foule joyeuse marche à la queue leu-leu dans le chemin étroit au son du violon, un étrange personnage aux cheveux filasse surmontés d’un vieux chapeau mousquetaire déformé, surgit soudain. Mal rasé, culotte bouffante usée sur guêtres de cuir, chaussé de lourds sabots, d’où sort-il ? D’un autre âge ? La forêt l’aurait-elle gardé captif ? La musique se tait. il ne se laisse pas impressionner par le monde et loin d’être apeuré harangue la foule de toute sa hauteur.
– Eh vous là, qu’est-ce que vous venez faire chez moi ? Qui vous a permis de rentrer dans le domaine de Pédégueine ?
La foule saisie ne bouge plus. Moment d’hésitation. Trouble qui se répand. C’est réel ? c’est un jeu ? c’est qui ce type vraiment pas engageant ?
– Bon, je vois que vous êtes nombreux, se radoucit-il soudain. Vous voulez voir mon royaume ? Allez, venez, je vous montre la route.
Il ouvre désormais la marche, accompagné du violon. Les enfants s’approchent, lui prennent la main en riant, ravis de la rencontre avec ce Jack Sparrrow déglingué, un crâne de belette autour du cou.
– C’est ton doudou ? demande un petit enfant intrigué. Et la foule de suivre ce drôle de personnage qui tout l’après-midi ponctue la balade de folles histoires des habitants des bois, des sagnes, des rivières…tous ces êtres qui vivent là et savent si bien les secrets de la nature sauvage … »

la fête d’Allouine et GB

29 octobre, foyer rural de Brousses. Une trentaine de monstres, sorcières, pirates, têtes de mort ou de citrouille envahissent la petite salle des fêtes. Ouf  ! Les parents sont là aussi pour surveiller leur progéniture. Et qui doit les occuper pendant une heure ? C’est bibi. Alors j’ai conté et raconté et joué aussi un peu de zizique. Mais que ne ferait-on par pour Allouine ?


 

installation « Tissons-Desliens »

La 11° édition du festival du film documentaire Echos d’ici, Echos d’ailleurs de Labastide-Rouairoux  était consacrée  à l’art. Pour l’occasion j’ai conçu une sorte de mémorial renfermant une trentaine de citations d’artistes sur papier glacé. Elles sont disposées sur un volume de plusieurs mètres cube formé par des palettes et des cagettes et recouvert de vieilles toiles de jute « les bourras » maintes fois reprisées. Ce volume est  à son tour enclos par des sortes de « pénétrables » à la façon de Soto qui définissent un espace de 20 mètres carrés. Ils sont constitués de milliers de cônes de plastique ou de carton issus eux aussi de l’industrie textile; je comptais réaliser toute l’installation en noir mais les dernières usines textiles que j’ai contactées n’étaient pas en mesure de m’en fournir assez. C’est pourquoi la façade de mon installation est verte (avec une coquetterie rouge au milieu, fente ? ouverture ? cicatrice ?), un côté noir et l’autre en cônes de carton. L’installation est restée visible quelques jours, a été appréciée et visitée par des classes scolaires.

Love tour 2018

Love Tour qui allait, je le rappelle, de Beaulieu à Beaulieu, Beaulieu à Beaulieu, pour finir  à Beaulieu en passant par Beaulieu. Nous avons donc tenté avec Marie de faire la dernière étape , Beaulieu  (du Gard ) à Beaulieu (près Montpellier ). De love point, un peloton lancé à 32-35 km /h, pas un seul bonjour… et nous loin loin derrière sans carte, sans topo, sans trace, sans GPS en pleine pampa ! D’où le recours aux solutions éprouvées, se guider  à l’estime, au soleil pour finir par dégotter une carte  touristique dans un camping et rallier l’étape deux heures après tout le monde. Bôôôn… reste la photo sympa avec nos potes de chez Cyclable .